Visites de deux catamarans à vendre en Espagne
L'épave du Dean Jag 530 nous intrigue ([voir l’article : La recherche du bateau idéal pour la restauration en propulsion électrique]({{< ref …
Nous sommes maintenant propriétaires d’un catamaran à moteur, mais sans moteur. Il est donc nécessaire de choisir le nouveau système de propulsion électrique, et les batteries. Nous venons de signer l’achat d’un système de deux moteurs 50 kW sous 96V, et 72 kWh de batteries. Avant de préciser les détails techniques du système que nous avons choisi, je vais partager ici le cheminement qui nous a amené à cette décision : quelle puissance est nécessaire pour nos besoins et ensuite quels ont été les fournisseurs considérés et consultés.
Dean Catamarans avait équipé le Jag 530 avec deux moteurs Vetus DTA 67 de 286 HP chacun. Ces moteurs permettaient une vitesse de croisière de 15 nœuds, et une vitesse de pointe de 20 nœuds. Comme nous nous dirigeons vers la propulsion électrique, nous allons parler de puissance en kW, et pas en HP. Les moteurs d’origine avaient donc une puissance de 210 kW chacun.
En faisant une estimation rapide de l’énergie solaire que nous pouvons espérer produire avec la surface disponible, on se trouve autour de 15 kWp. kWp signifie “kilowatt peak”, ou l’énergie que les panneaux solaires peuvent fournir dans des conditions idéales d’ensoleillement. Pour être réaliste, nous pouvons espérer générer 5 à 6 fois ce “peak rating” par jour, soit entre 75 kWh et 90 kWh pour une très belle journée d’été. Il est donc évident qu’il serait totalement inutile d’avoir une propulsion capable de 400 kW, car l’énergie générée en une journée serait consommée en moins de 15 minutes. En résumé, se baser sur l’ancienne motorisation n’est pas la bonne approche.
Il nous faut en fait prendre le problème à l’envers, et décider quelle vitesse de croisière est satisfaisante, et quelle vitesse de pointe nous souhaitons pouvoir atteindre. Une vitesse de croisière de 4 à 5 nœuds nous semble acceptable car nous voulons vraiment éviter d’avoir à utiliser une énergie autre que solaire, et nous sommes déterminés à vivre plus lentement, plus en harmonie avec notre environnement. La plupart des navires de croisière à voile naviguent en général à des vitesses de 4 à 6 nœuds. Pour prendre un exemple concret, prenons la distance de Nice à Calvi pour une traversée vers la Corse. Il faut environ 22 heures pour parcourir les 100 miles nautiques en ligne droite à cette vitesse moyenne, soit un petit peu moins d’un jour et d’une nuit, ce qui est habituel pour les voileux. Pour le choix de la vitesse de pointe, être proche de 10 nœuds serait souhaitable, soit pour pouvoir atteindre un abri rapidement si la météo se détériore, soit pour pouvoir avancer contre un fort courant dans une passe, ou autre situation difficile. Dans tous les cas, il faut être conscient que la vitesse de pointe ne sera pas soutenable pour longtemps : peut être 30 minutes à 60 minutes maximum.
Une fois les vitesses de croisière et de pointe définies, nous pouvons utiliser des formules pour bateau à coque à déplacement (notre catamaran ne pourra jamais partir en planing avec ses 20 tonnes). Deux formules sont intéressantes pour cela : la formule de Keith et celle de Crouch. La formule de Keith prend en compte le poids et la longueur à la ligne de flottaison du bateau, alors que Crouch n’utilise que le poids. Elles donnent des résultats avec des différences importantes, donc pour nos estimations, on décide de faire la moyenne entre les deux.
Formule de Crouch : Vitesse = Constant / sqrt(Poids/Puissance) avec Vitesse en noeuds, Poids en livres, et Puissance en chevaux. La Constant dépend du type de bateau; dans notre cas, c’est entre 150 et 190.
Formule de Keith : Vitesse = 5280/6080 x sqrt(Longueur) x 1.4 x exp((log(Puissance x 1000 / Poids)) / 3 x 2.30258) avec Vitesse en noeuds, Poids en livres, Puissance en chevaux et Longueur en pieds
Il existe d’autres formules très proches de Keith : les formules de Wyman et de Geer. Elles ont toutes les 3 la même forme, mais avec des coefficients différents.
Cette moyenne entre les formules de Keith et de Crouch nous donne que pour avancer à 4 nœuds, il nous faudrait 10 kW, à 5 nœuds 18 kW, et à 10 nœuds 100 kW.
Avec ces estimations nous décidons que 2 moteurs pouvant fournir de 50 kW chacun, devraient convenir.
Une autre information pertinente est de demander aux professionnels de la construction navale de plaisance quelle puissance ils préconisent, sachant que nous souhaitons avancer doucement, comme un voilier, et non pas comme un bateau à moteur rapide.
Notre chantier naval recommande une motorisation d’au moins 5 HP par tonne de bateau. Ils utilisent cette règle pour choisir un moteur diesel pour un voilier. Cela fait 3.8 kW par tonne, donc 76 kW pour notre catamaran de 20 tonnes.
Lors de la recherche de moteurs, nous avons trouvé que le fournisseur Fischer Panda recommandait 2.5 kW par tonne, soit 50 kW pour notre catamaran de 20 tonnes.
Une autre source, sur le site Multihull.de propose 1 kW par 300 kg, soit 3.33 kW par tonne, ou 66.6 kW pour notre catamaran.
Ces informations confirment que notre but d’avoir 100 kW maximum avec nos 2 moteurs devrait fonctionner.
Une autre façon de vérifier nos estimations est de les comparer avec ce que des constructeurs ont fait avant nous. Je collecte depuis un certain temps toutes les informations que je trouve sur les bateaux à propulsion électrique et solaire dans un document, et je peux ainsi voir la motorisation utilisée pour les catamarans d’un poids proche de notre Jag 530.
Je résume dans le tableau ci dessous les informations intéressantes pour cet article :
Constructeur | Modèle | Année | Poids | Motorisation | kW par tonne |
---|---|---|---|---|---|
Solar Yachts | Silent 64 | 2016 | 25 | 2x 30 kW | 2.4 |
Solar Yachts | Silent 55 | 2019 | 19 | 2x 30 kW | 3.2 |
Solar Yachts | Silent 55 Cruiser | 2020 | 23 | 2x 50 kW | 4.3 |
Solar Yachts | Silent 55 E-Power | 2020 | 23 | 2x 150 kW | 13.0 |
Solar Yachts | Silent 55 E-Power+ | 2020 | 23 | 2x 250 kW | 21.7 |
Azura Marine | Aquanima 40 | 2020 | 7 | 2x 10 kW | 2.8 |
(custom) | Sun 21 | 2006 | 12 | 2x 8 kW | 2.0 |
Soel Yatchs | Soelcat 12 | 2017 | 10 | 2x 40 kW | 8.0 |
Soel Yatchs | SoelSense 48 | 2020 | 10 | 2x 40 kW | 8.0 |
metaltec naval | ECOCAT 12m | 2020 | 12 | 2x 20 kW | 3.33 |
Aquila (custom) | 44 - First Edition | 2019 | 18 | 2x 50kW | 5.6 |
La vue de ces chiffres nous rassure sur notre décision de motoriser avec 2x 50 kW, en alignement avec ce qui a été fait auparavant, surtout pour les catamarans construits jusqu’à il y a un an. En 2020, les nouveaux modèles ont commencé à utiliser des motorisations plus puissantes, mais la plupart sont des hybrides avec de gros générateurs diesel à bord pour fournir l’énergie nécessaire pour alimenter les moteurs.
Sur cette courbe vitesse/puissance du nouveau Silent Yacht Silent 55 Cruiser, on remarque que la plage de puissance de 100 kW à 300 kW pousse le catamaran de 10 à 17 nœuds.
Maintenant que nous avons une bonne idée de la puissance souhaitée pour notre système, un autre paramètre important à décider est la tension d’alimentation que nous allons utiliser pour la propulsion.
Le Dean Catamarans Jag 530, comme la plupart des bateaux de cette taille, avait des batteries pour le circuit 12V pour l’électronique de navigation et les équipements de sécurité, et une grosse banque 24V pour tout le reste. Pour pouvoir prendre au maximum 100 kW sur une banque 24V, il faudrait tirer un courant de plus de 4000A. C’est impossible techniquement.
12V et 24V sont des tensions sans risque d’électrocution pour l’être humain, même dans un milieu humide. 48V est considéré comme la limite de ce domaine non dangereux. Au-delà, il faut prendre davantage de précautions lors de l’installation et la maintenance du système électrique.
Les 4 tensions couramment utilisées par les fabricants de moteurs et de contrôleurs sont les suivantes, avec le courant maximum nécessaire pour nos 100kW souhaités :
Plus le courant est faible, moins les câbles électriques sont lourds, mais plus le danger de manipulation est grand avec la haute tension nécessaire.
Un autre facteur entre en jeu. Le choix de la tension du système de propulsion induit également le choix de la tension des batteries. En effet, avec les courants nécessaires, nous ne pouvons pas nous permettre de faire de la conversion DC-DC pour 100kW (par exemple pour transformer du 48V vers du 400V pour aller vers les moteurs). Une conversion DC-DC cause une perte de l’énergie d’environ 5% en chaleur, et ces convertisseurs ont un coût prohibitif.
Nous aurons donc besoin de trouver un certain nombres de composants qui pourront fonctionner à la tension de la banque de batterie haute tension :
En 48V, l’offre est abondante. Au-delà, les produits sont plus rares. Une recherche rapide montre qu’on trouve des chargeurs MPPT pour 96V, ainsi que des onduleurs. À 144V cela devient plus difficile, et a 400V+, c’est extrêmement complexe à trouver, car ça sort du domaine de ce que l’on peut faire nous-mêmes.
En conclusion, deux tensions peuvent convenir à notre projet : une propulsion à 48V serait idéale, et une propulsion à 96V serait acceptable, avec l’avantage de courants diminués de moitié dans les câbles par rapport à 48V.
La vitesse de rotation de l’hélice d’un bateau à voile est en général entre 850 et 1650 rotations par minute (RPM). Nous avons la place pour mettre des hélices jusqu’à 1 mètre de diamètre sous notre catamaran donc il serait plutôt intéressant d’avoir une vitesse de rotation faible avec de grandes hélices. Cela minimiserait le bruit, les vibrations, éviterait les risques de cavitation, etc.
Les moteurs diesel utilisent une boîte de réduction pour obtenir une vitesse de rotation de l’arbre d’hélice vers 1000 tours par minute (RPM). Pour notre projet, l’objectif est d’éviter une réduction de vitesse mécanique. Cela ajouterait un coût supplémentaire, du poids, du bruit, de la maintenance, etc. On cherche donc de préférence un fournisseur dont le système de moteur peut fonctionner sans boîte de réduction, avec une puissance maximale à une vitesse proche des 1000 RPM.
Modèle EasyBox HV | Puissance 50 kW | Tension 360V | Transmission directe Oui
Points positifs :
Points négatifs :
Modèle ACX30 | Puissance 30 kW | Tension 48V | Transmission directe Oui
Points positifs :
Points négatifs :
Modèle ISCAD V50 | Puissance 50 kW | Tension 48 V | Transmission directe Non
Points positifs :
Points négatifs :
Modèle Gear motors for extra heavy duty | Puissance 50 kW | Tension 144 V | Transmission directe Non
Points positifs :
Points négatifs :
Modèle Electric Propulsion System | Puissance 23 kW | Tension 96V | Transmission directe Oui
Points positifs :
Points négatifs :
Modèle WA WAz 30 AC | Puissance 30 kW | Tension 144V | Transmission directe Non
Points positifs :
Points négatifs :
Modèle DriveMaster 45W | Puissance 45 kW | Tension 144V | Transmission directe Oui
Points positifs :
Points négatifs :
Modèle 50IB | Puissance 50 kW | Tension 96V | Transmission directe Oui
Points positifs :
Points négatifs :
Modèle 35 WGH | Puissance 35 kW | Tension 144V | Transmission directe Oui
Points positifs :
Points négatifs :
Modèle QuietTorque 30 LC | Puissance 30 kW | Tension 48 V | Transmission directe Oui
Points positifs :
Points négatifs :
Modèle MA300 | Puissance 30 kW | Tension 96 V | Transmission directe Oui
Points négatifs :
Modèle EP-100 | Puissance 42 kW | Tension 144 V | Transmission directe Oui
Points positifs :
Points négatifs :
Le choix du fournisseur a beaucoup évolué au cours des 2 derniers mois. J’étais très intéressé de travailler avec Molabo, non seulement pour aider une jeune startup à démarrer, mais aussi pour les qualités de leur moteur. Malheureusement, nos derniers échanges ont montré qu’il est nécessaire d’utiliser un réducteur de vitesse mécanique sur l’arbre du moteur. Le coût additionnel est acceptable, à environ 600 Euros par moteur, mais le but est d’avoir le moteur directement sur l’arbre d’hélice, donc j’ai abandonné leur proposition. Leur solution est très intéressante pour des bateaux rapides et légers, pas forcément pour notre cas de bateau lent et lourd.
Ensuite, j’ai décidé de travailler avec Bell Marine. Leur produit est solide, et bien que leur moteur de 45 kW soit en 144V, ils peuvent fournir les chargeurs à partir des panneaux solaires pour les batteries 144V (chargeurs MPPT AERL Coolmax), et proposent aussi un onduleur 144V. Acheter chez eux un système complet résout mon plus gros souci avec le 144V. Cependant, après un premier contact avec Bell Marine aux Pays-Bas, ils m’ont redirigé vers leur revendeur en Espagne, car ils ne vendent pas en direct. Les quelques contacts n’ont pas été fructueux. Pas de soucis pour envoyer des PDFs de plusieurs pages avec des images, et des montants, mais pas d’expertise technique sur les produits demandés, et une lenteur à obtenir chaque réponse. Ma confiance a avoir un interlocuteur capable de s’assurer que tous les composants seront bien choisis, bien configurés, a disparu.
J’ai alors repris ma liste de fournisseurs possibles, et j’ai contacté un entrepreneur allemand, intégrateur de systèmes de propulsions électriques pour bateaux et pour véhicules terrestres, RiPower GmbH. La première tentative d’une communication téléphonique n’a pas été un succès, car le propriétaire ne parle pas Anglais, et mon Allemand est trop limité. Nous avons donc convenu d’échanger par email en Anglais, et il utilisera Google Translate. Après avoir expliqué le projet, fourni des détails, spécifications, et photos du catamaran, RiPower m’a fait une proposition commerciale comprenant les moteurs de 50 kW en 96V, les batteries, les manettes de gaz, un chargeur 220V, le calcul et la fourniture des hélices, les câbles. Ce qui est intéressant c’est que nous pouvons aller en voiture sur place si besoin, car l’atelier de RiPower est à 1h30 de route de notre habitation à Berlin.
La commande a été passée avec RiPower GmbH. Nous avons hâte que nos moteurs et batteries arrivent à Alicante!
L'épave du Dean Jag 530 nous intrigue ([voir l’article : La recherche du bateau idéal pour la restauration en propulsion électrique]({{< ref …
Je résume ici mes recherches, lectures et réflexions sur le type de bateau qui pourrait servir de point de départ à notre projet. Il n’est pas …